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Ironie Ironie
Ironie
Interrogation
Critique et Ludique n°165 – Novembre/Décembre 2012
http://ironie.free.fr
– ISSN 1285-8544
IRONIE :
51, rue Boussingault - 75013 Paris
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Manet Tintoret Manet
L’autoportrait
Manet – Portrait
de Tintoret - 1854
Giacometti, au Louvre, devant l’Autoportrait de Tintoret :
« On ne l’approche pas, il reste toujours à distance, comme la réalité. C’est un des tableaux que j’ai le plus aimés au Louvre en arrivant à Paris. Il est le seul à se rapprocher du Fayoum, de Byzance. Il va plus loin que Rembrandt (Cézanne, lui, va ailleurs). C’est tout le crâne : l’œil mais aussi l’orbite, la structure même de la tête. Et c’est fait avec rien. Vraiment, la plus belle tête du Louvre. »
En 1923, sur une feuille, Giacometti note : « Le Tintoret : Puissance infinie, profondeur, esprit, invention, vision qui embrasse tout dans l’univers – tragique, serein, violent – jusqu’à la couleur et au dessin, sentiment d’unité détaché de toute objectivité ; portraits vrais et profonds. »
Manet, en 1854, s’était lui aussi arrêté devant cette tête fascinante. Il décide même de la copier tel un manifeste. Manet a alors vingt deux ans. Tintoret sera un de ses phares. En estompant les rides du peintre vénitien, Manet rajeunit Tintoret. Il est là avec lui dans le temps, presque un autoportrait de Manet tel qu’il se projette.
N’est-ce pas cette impression d’éternité fixée que Manet a voulu saisir lorsqu’il choisit de copier ce tableau ? Que contemple-t-il dans le regard éternel de Jacopo Tintoretto ? Le Temps. Que cherche-t-il à saisir dans la peinture ? Le Temps. La peinture est l’une des plus belles propositions pour se substituer au temps de l’horloge, au temps de ceux qui ne font que passer.
En copiant librement cet autoportrait de Tintoret, Manet réalise un acte d’admiration pour ce peintre. Ce pourrait n’être qu’une copie ; pour Manet, c’est bien plus. Il cadre l’autoportrait en plan légèrement rapproché et avance le regard du peintre vers les voyants. Il éclaircit également le clair-obscur de la toile de Tintoret. Le fond brun est brossé avec énergie. Le visage fixe sa passion de voir le monde par ses propres yeux. Manet restera fidèle à cette icône du temps, de l’être-là du peintre.
Dans l’exposition qu’il organise en 1867 pour montrer son œuvre dans son ensemble et couper court aux acharnements contre sa peinture, il choisit de montrer trois copies, comme trois axes esthétiques :
« COPIES
La Vierge au lapin, d’après Titien.
Portrait de Tintoret, d’après Tintoret.
Les Petits Cavaliers, d’après Vélasquez. »
Manet donne ici le ton, sa politique : les femmes, le peintre, la guerre ; et sa généalogie : Titien, Tintoret et Vélasquez. Tintoret s’inspirant directement de Titien, et Vélasquez, à son tour, des deux maîtres vénitiens.
Dans ses Motifs d’une exposition particulière, en mai 1867, Manet écrit, en parlant de lui à la troisième personne du singulier :
« Montrer, c’est trouver des amis et des alliés pour la lutte. M. Manet a toujours reconnu le talent là où il se trouve et n’a prétendu ni renverser une ancienne peinture ni en créer une nouvelle. Il a cherché simplement à être lui-même et non un autre. »
Dans ces trois copies, dans ces hommages à Titien, Tintoret et Vélasquez, Manet est lui-même. Ces trois grands peintres sont des amis et des alliés pour la guerre du goût.
***
Les blondes aux seins nus
« Le
ciel a créé la beauté féminine,
Afin qu’elle procure la félicité sur
terre
À tout
homme qui sait apprécier la grâce. »
Veronica
Franco – Tre rime
Attribué à Domenico Tintoretto - Portrait d’une courtisane
Jacopo Tintoretto - Portrait d’une femme
Nous ne savons pas exactement si ces
portraits sont de la main de Tintoret ni s’ils correspondent au portrait
présumé de Veronica Franco, célèbre courtisane de Venise, contemporaine du
peintre, née en 1546 et morte en 1591. La lettre d’éloge de Veronica Franco à
Tintoret suit de près la réalisation d’un portrait d’elle et semble avoir été
écrite vers 1575, juste après le passage d’Henri III[1]
dans la cité :
« Des gentilshommes très experts
dans l’Antiquité, on dit qu’aujourd’hui, il y a des peintres et des sculpteurs
qui n’ont rien à envier aux anciens, et même qui les dépassent dans leur art,
tels Michel-Ange, Raphaël, Titien et d’autres encore, dont vous maintenant. Je ne
dis pas cela pour vous flatter, parce que ceux qui affirment que votre art
dépasse celui des anciens est un auditoire bien expérimenté et si vous faites
semblant qu’il ne l’est pas, c’est parce que vous vous bouchez les oreilles aux
louanges, et que vous ne vous occupez pas de savoir à quel point les gens vous
estiment pour votre art […].
Vous êtes capable non pas seulement de
reproduire la nature mais aussi de la dépasser quand elle est imitable, par
exemple en modelant des silhouettes nues ou habillés en leur donnant des
couleurs, des ombres, des profils, des muscles, des mouvements, des postures,
des plis […] au point de réussir aussi à montrer les formes de l’âme […].
Je vous assure que lorsque j’ai vu mon
portrait, œuvre produite par votre divine main, je me suis demandée longuement
s’il s’agissait d’une peinture ou d’une pure magie apparue devant moi à travers
une diabolique illusion, non pour que je tombe amoureuse de moi-même, comme
Narcisse, parce que Dieu merci, je ne me juge pas si belle au point de brûler
d’envie pour ma beauté, mais pour bien d’autres buts, que moi seule je connais.
Je peux vous dire avec certitude que la féconde nature a constaté à quel point
vous l’imitez et même la dépassez […] et elle n’osera jamais fournir à nos
contemporains un si élevé esprit de jugement afin qu’ils puissent expliquer
l’excellence de votre art […].
Et quant à moi, certaine de ne pas
réussir dans une telle entreprise, je pose maintenant ma plume et je vous
souhaite de la part de Notre Seigneur tout le bonheur[2]. »
Dans les deux portraits de Tintoret qui
semblent avoir le même modèle, nous lisons l’importance des seins dans la
culture des Vénitiens et des courtisanes. En effet, ces dernières avaient pour
coutume, pour aguicher les passants, de montrer leurs seins dans les ruelles ou
de leurs balcons[3].
Dans une lettre de Veronica Franco qui tente de dissuader une mère de faire de
sa fille une courtisane, elle écrit : « Quand vous me l’avez amenée,
les cheveux teints en blond et épars autour du front, sans bandeau sur la tête,
la poitrine découverte, les seins débordant presque de son corsage, avec tous
les embellissements auxquels ont recours les courtisanes pour faire valoir leur
marchandise, j’ai eu grande peine, je vous le jure, à la reconnaître sous ce
travestissement. »
Dans le premier portrait (musée du
Prado), qui a longtemps été attribué à Tintoret[4],
la femme dénude ses seins mis en valeur par un large collier de perles.
Dans le second (Worcester Art Museum),
la courtisane d’un geste plus subtil découvre légèrement un pan rose de son
aréole. Elle semble plus raffinée de part ses habits et ses bijoux plus variés.
Sa robe et ses étoffes en font une véritable princesse.
Par ses portraits de courtisanes et ses
portraits de femme dans ses compositions profanes et sacrées, Tintoret rend
hommage à la beauté des femmes.
Manet reprendra le portrait du Prado comme
base pour la composition de sa Blonde aux
seins nus. Françoise Cachin en 1983, lors de la rétrospective Manet au
Grand Palais, indique que le peintre français s’inspire directement du tableau
de Tintoret pour sa Blonde aux seins nus
peinte entre 1875 et 1878. Manet a visité le musée du Prado en 1865. Peut-être
a-t-il conservé une reproduction ou une copie de ce tableau ou juste un
souvenir précis ? Observons qu’elles ont presque le même visage, le même
profil. Les couleurs changent. Le fond du tableau de Manet est vert comme s’il
avait voulu mettre en scène son modèle en pleine nature, en plein soleil.
Eclaircie sur les seins.
Lors de la vente à Vollard de certains
tableaux de son mari en 1894, Mme Suzanne Manet écrit au sujet de cette
toile : « Pas payé, Amélie-Jeanne, buste nu ». Qui est cette
Amélie-Jeanne ? Est-ce une autre de ses modèles[5]? Un
nom de code ? Une rencontre amoureuse de Manet ? Il y a là une
tension de beauté et d’amour, une déesse grecque, une nymphe sortie des
bosquets. Ces seins nus dans la nature de Manet, peints en 1878, ne sont-ils pas
des échos picturaux à ceux peints par Renoir en 1875-76 et qui ont fait tant de
scandale… Renoir disait : « Un peintre, voyez-vous, qui a le
sentiment des tétons et des fesses, est un homme sauvé. »
Renoir – Etude. Torse, effet de soleil
De mon côté, je remarque des analogies
entre le portrait habillé de Méry Laurent avec son chapeau à plumes, le paon,
et le portrait de la blonde aux seins nus comme une interprétation amusée de la
Maja vêtue et la Maja nue de Goya ! La blonde aux seins nus, la Veronica Franco
de Manet, semble être Méry Laurent ! Même profil, même regard. Les seins
habillés, intérieur jour, et les seins nus, extérieur jour, vont de concert.
Manet, trois cents ans après, fait
revivre l’art de Tintoret, donne une nouvelle jeunesse à cette nudité
amoureuse. Ils ont en commun d’être des pittore
delle tette !
***
Tintoret est un peintre d’éclaircies, de
miracles, de résurrections sur fond noir.
N’est-ce pas ce que Manet ne cesse de
répéter : « L’art doit être l’écriture de la vie » ; ou ce
que Shitao distille dans ses pensées sur la peinture : « L’esprit du
pinceau est une question de vie. »
Les baigneuses
Il fait de
Suzanne une déesse grecque, une Vénus à sa toilette, une baigneuse. Il se sert
de cette figure pour condenser plusieurs récits de femmes : Bethsabée au
bain charmant David et Diane au bain épiée par Actéon. D’ailleurs, dans la Suzanne
de Vienne, au second plan à gauche au-dessus du vieillard voyeur à terre, nous
apercevons un cerf. Serait-ce là l’indice d’une future métamorphose pour ce
vieillard trop entreprenant ?
Agostino
Carracci - Toilette de Vénus
Parmi ces
quatre représentations, seule la deuxième version de Tintoret, la Suzanne du
Prado, implique des vieillards plus entreprenants qui ne semblent guère gêner
l’héroïne. Là encore, Eros se joint à l’esprit satyrique du peintre. Un des
vieillards pose sa main sur un des seins de Suzanne. L’autre fait mine de
s’approcher en avançant une de ses mains. Ce goût du toucher sera mis en scène
dans une gravure d’Agostino Carracci qui détourne dans ses Lascives le
sujet de la Suzanne du Louvre en la transformant en une toilette érotique
d’Aphrodite faite par un enfant lui coupant les ongles et un petit satyre
excité touchant de son doigt le sexe de la déesse de la beauté.
Les trois
autres représentations de Tintoret mettent plutôt en scène des vieillards à
distance, tentant des poses comiques pour voir l’intimité de Suzanne. Tintoret
glisse ici et là des réflexions sur la vision, sur le voyeurisme du peintre
vis-à-vis de son modèle et sur les désirs des voyants.
La Suzanne
de Vienne montre un corps imposant et beau protégé par une haie couverte de
roses. Les vieillards cachés et visibles se servent de cet écran végétal pour
inciter le voyant à regarder ce qu’ils souhaitent voir. Car dans les tableaux
montrant Suzanne, à part celui du Prado, les vieillards ne semblent pas épier
directement Suzanne. Ils regardent vers la forêt, par terre, dans des positions
où paraît impossible la vision du corps nu de Suzanne. Les vieillards sont là
pour indiquer qu’il y a quelque chose à voir : ils sont les panneaux de
signalétique amusés de Tintoret pour dire aux voyants que Suzanne est le cœur
du désir, la beauté du voir, le goût du toucher. Le voyant s’approche donc,
s’apprête à toucher Suzanne et une alarme muséale sonne. Un gardien
accourt : vous vous êtes trop approché, Suzanne est bien gardée !
Tintoret cueille le jour de Suzanne à sa toilette.
« La distance physique qu’impose le
rosier entre les voyeurs et la jeune femme, véritable écran de séparation qui
protège les vieillards autant qu’il les maintient loin de l’objet de leur
convoitise, donne à voir concrètement cette douleur propre au désir amoureux
inassouvi. La vision donne "envie" comme le suggère la parenté étymologique entre "invidia" et "videre"[7]. »
Raphaël - Vénus s’enlevant
une épine
Marco da Ravenna - Vénus s’enlevant une épine
Tintoret – Etude d’une femme nue
Pour toutes
ces compositions, Tintoret puise dans différentes références visuelles : un
dessin de Raphaël représentant Vénus s’enlevant une épine de son pied,
figure prévue pour la décoration de la salle de bain des appartements du
cardinal Bibbiena au Vatican. Cette pose était connue de Tintoret grâce à une
gravure de Marco da Ravenna. On remarque également un lien avec la pose de la
figure féminine de La Tempête de Giorgione que Tintoret
connaissait sûrement[8].
Giorgione
– La Tempête
Tintoret – Moïse sauvé des eaux
Manet – Moïse sauvé des
eaux[9]
Toutes les
scènes se trouvent fixées dans un paysage et le nu de Suzanne apparaît comme un
soleil au cœur des forêts. Son corps lumineux est mis en avant par l’obscurité
des arbustes au second plan.
Je songe alors
au Déjeuner sur l’herbe de Manet. Si le Concert champêtre de
Giorgione et la Vénus du Pardo de Titien sont souvent cités comme
sources de cette composition de Manet, je crois que l’on peut également y
associer la Suzanne de Tintoret : la pose de la jambe relevée, le regard
vers le voyant, et la pose du bras et du coude qui cache à peine la forme des
seins.
Manet a
sûrement prêté attention à cette peinture de Tintoret qui
était exposée au Louvre dans la même
salle que le Concert champêtre. D’abord parce qu’il avait déjà fait une
version personnelle de l’autoportrait du maître vénitien en 1854, et ensuite
parce qu’il partage sa vie avec une Suzanne (Leenhoff). Il se marie avec elle
en octobre 1863, la même année où le Déjeuner sur l’herbe est exposé au
Salon des refusés.
Dans le
tableau, c’est Victorine Meurant qui joue le rôle d’une Suzanne moderne. Ironie
de Manet qui fait poser son modèle dans la pose d’une femme qui a le même prénom
que sa femme. Autre ironie : dans sa composition, Manet métamorphose les
vieillards en de jeunes hommes habillés qui entourent la jeune femme nue. Il ne
faut pas oublier également que le titre originel du Déjeuner sur l’herbe
était Le Bain ce qui renvoie au titre du tableau de Tintoret :
Suzanne au bain.
Les Suzanne
de Tintoret sont en effet des baigneuses. Fragonard, Ingres, Courbet, Cézanne
et Renoir, grands connaisseurs de l’œuvre de Tintoret, s’en souviendront.
Lionel Dax – Extraits de Liberté
de Tintoret (à paraître)
***
Lettre de Renoir à Manet
Capri, 28 décembre [18]81
Mon cher Manet,
Il y a longtemps que je voulais vous écrire à propos de la nomination de Proust, et je ne l’ai pas fait[10]. Cependant il vient de me tomber sous la main un vieux Petit Journal, qui parle avec transport des achats des tableaux du maître Courbet, ce qui m’a fait un plaisir extrême[11]. Non pas pour Courbet, ce pauvre vieux, qui ne peut pas jouir de son triomphe, mais pour l’art français. Il y a donc enfin un ministre qui se doute que l’on fait de la peinture en France. Et j’attendais dans le numéro suivant du même Petit Journal, votre nomination de Chevalier, ce qui m’eût fait applaudir de mon île lointaine[12]. Mais j’espère que ce n’est que retardé et qu’à mon entrée dans la capitale j’aurai à saluer en vous le peintre aimé de tout le monde, reconnu officiellement. Car je suppose que ce ministre, intelligent et brave comme il me paraît, doit savoir que son portrait est fait pour le Louvre, et non pas pour lui[13].
Vous ne supposez pas, je crois, qu’il
entre dans ma correspondance un seul mot de compliment.
Vous êtes le lutteur joyeux, sans haine
pour personne, comme un vieux Gaulois, et je vous aime à cause de cette gaîté
même dans l’injustice.
Je suis dans un joli pays, mais sans
beaucoup de nouvelles. Quand la mer est grosse je n’ai aucuns journaux, et pas
français [sic], et je ne sais comment le Petit
Journal est venu s’égarer à Capri où je suis [le] seul Français.
Vous ne vous doutez pas que je vous
écris pour vous souhaiter la bonne année. Eh bien si, je le fais, et avec joie.
Quand je reviendrai, vous me ferez bien
plaisir en venant voir ce que j’ai rapporté, mais nous n’en sommes pas là.
Je ne sais quand vous recevrez cette
lettre car le courrier est irrégulier. Voilà déjà quatre jours de tempête et
plus de six jours que je n’ai reçu aucune lettre de Paris. Le temps se remet,
j’espère que cette lettre arrivera bientôt.
Ah, mon cher Manet, j’oubliais [le]
nouveau ministère. Pensez donc à ce pauvre Lestringuez[14].
34 ans, connaissant bien son service, ce serait un rude sous-chef aux
Beaux-Arts. Qu’en pensez-vous ? Êtes-vous de mon avis ? Dites-le moi
dans un mot. Je vous serais bien reconnaissant. C’est une idée qui me pousse
avec ma plume. Vous me pardonnerez car je n’ai pas oublié que vous avez été
déjà bon camarade, comme toujours.
À bientôt,
et mille amitiés et une longue santé,
Renoir
Albergo
La Trinacria, piazzetta Principessa Margherita, Napoli.
C’est
de là qu’on m’envoie les lettres à Capri.
Musée du Louvre,
département des arts graphiques. Aut. 3642.
Transcription et annotation : Augustin de Butler.
[1] Ce dernier a eu lors de sa visite à Venise un
rendez-vous, en toute intimité, avec la célèbre courtisane.
[2] Traduction inédite d’Elena Taddia.
[3] Il existe encore à Venise, dans le quartier de Santa
Croce, un Ponte delle tette (un pont
aux tétons).
[4] Du temps de Manet, ce tableau était attribué à Jacopo
Tintoretto. Aujourd’hui, il est attribué au fils du grand peintre, Domenico
Tintoretto.
[5] Samuel Rodary m’écrit : « Selon Tabarant, la Blonde aux
seins nus aurait été posé par un modèle nommé Marguerite. Modèle dont on ne
sait pas grand-chose... La mention d’une "Amélie-Jeanne" par Mme
Manet s’explique par l’existence d’un modèle professionnel, portant ces
prénoms, qui posa pour plusieurs peintres entre 1878 et 1880. Qu’elle s’appelle
Amélie ou Marguerite, cette même femme aurait posé pour un autre nu peint, le
magnifique Nu se coiffant (actuelle
collection Jeff Koons) et au moins deux pastels de femme au tub. Tout cela
réalisé autour de 1878. » Au fond, qu’importe le prénom pourvu qu’on ait
l’ivresse !
[6] Il est avec Véronèse le peintre vénitien qui s’est le
plus intéressé à ce récit biblique dans lequel l’érotisme est un savant mélange
de sacré et de profane.
[7] Guillaume Cassegrain, Tintoret, Editions Hazan, Paris, 2010, p. 137.
[8] Sylvia Perino-Pagden et Robert Wald écrivent, dans le
catalogue de la rétrospective Tintoret au Prado en 2007, que la pose de la
femme dans La Tempête de Giorgione
était « très connue au XVIe siècle » et qu’elle avait
été « utilisée régulièrement par Tintoret notamment dans le Moïse sauvé des eaux de la Collection
Cini à Venise » attribué à son atelier.
[9] Manet pour
son Moïse sauvé des eaux inachevé avait fait posé sa femme Suzanne qui
se métamorphose en 1860-61 en Nymphe surprise. On remarque là encore un
axe reliant Giorgione et Manet en passant par Tintoret.
[10] Proche ami de Manet, journaliste, critique et homme
politique, Antonin Proust (1832-1905) avait été nommé ministre des Beaux-Arts,
le 14 novembre 1881, du gouvernement Gambetta.
[11] À la vente de l’atelier de Courbet, le 9 décembre
1881, l’État venait d’acquérir cinq toiles : L’Homme blessé (1844-1854), L’Homme
à la ceinture de cuir (1845-1846), Le
Rut du printemps (1861), L’Hallali du
cerf (1867) et La Sieste pendant la
saison des foins (1867).
[12] Antonin Proust était sur le point de faire nommer
Manet Chevalier de la Légion d’honneur.
[13] Allusion au Portrait
de M. Antonin Proust (1880, The Toledo Museum of Art), que Manet avait
exposé au Salon de 1880.
[14] Eugène Pierre Lestringuez (1847-1908), fonctionnaire
au ministère de l’Intérieur, et ami de Renoir.